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Contexte du développement du secteur privé de l’enseignement supérieur et universitaire en RD Congo

 

Par

Simon Kayoyo Umbela

Psychologie et Société Nouvelle, Volume XVIII, n°3

 

Résumé

Cet article tente de replacer, dans un contexte historique, l’émergence du secteur privé de l’enseignement supérieur et universitaire en RDC. Ce contexte est à situer dans le temps, c’est-à-dire aux environs des années 1990, en violation des dispositions législatives en vigueur qui accordait le monopole de l’Etat dans ce domaine, et s’explique par le déficit organisationnel et fonctionnel du secteur public.

Les efforts fournis par les pouvoirs publics, consistant à élaborer un cadre réglementaire a posteriori   devant régir le secteur privé, n’ont pas produit les effets escomptés. La conséquence qui découle de cette situation est que certains aspects négatifs, déplorés dans l’organisation et le fonctionnement des établissements privés, ont persisté, influant négativement sur la gestion de la qualité de l’enseignement au sein de ceux-ci.

 

Introduction

A travers le monde, l’enseignement supérieur privé est considéré comme une solution alternative de l’enseignement supérieur public et constitue l’une des stratégies de stabilisation et de revitalisation de ce niveau de formation afin de lui permettre de jouer pleinement son rôle.

Parmi les raisons avancées pour justifier cet état de choses, il y a le fait que le secteur public de l’enseignement supérieur se caractérise par un certain immobilisme dû notamment au manque de moyens financiers nécessaires pour entreprendre les réformes qui s’imposent, à la lourdeur administrative et surtout à la longueur de la procédure à suivre pour aboutir à de changements remarquables de ce qui existe. Ainsi, l’enseignement privé constitue un des moyens de corriger les vices de l’instruction publique, de suppléer à son imperfection, de soutenir avec zèle les maîtres par la concurrence, de soumettre la puissance publique à la censure de la raison des hommes éclairés (Monchambert, 1993 ; Lelievre, 1990).

Parlant particulièrement des universités privées sur la base d’une étude réalisée au Nigéria, Obasi (2007) conclut en disant que les universités privées sont en train de donner le ton et de servir comme une source de défi positif pour les universités publiques, offrant ainsi un environnement compétitif sain qui est nécessaire pour la croissance future et la diversification de tout le système d’enseignement supérieur.

 

Bref, pour les défenseurs de l’enseignement supérieur privé, l’apport de ce dernier, porte sur la diversification des sources de financement, la capacité d’entreprendre avec plus de souplesse les réformes nécessaires par le fait que le monde actuel est caractérisé par une prolifération rapide des connaissances et des innovations technologiques, l’ouverture d’une autre voie pour un accès élargi à cet enseignement sans ajouter sensiblement aux dépenses de l’Etat (Saint, p.48). En d’autres termes, le rôle de l’offre privée se situe dans la viabilité financière, l’accès, la pertinence et la qualité de l’enseignement supérieur.

En RDC, cette thèse est soutenue par Lututala (2002) qui, tout en reconnaissant les effets pervers du secteur privé, trouve que la privatisation de l’enseignement supérieur et universitaire est l’une des solutions qui semble s’imposer et acceptée par tous pour tenter d’arrêter la descente aux enfers de l’université congolaise.

Le secteur privé s'est imposé de soi, mettant ainsi le pouvoir public devant un fait accompli. Ainsi donc, face à la prolifération sans précédent des établissements privés d’ESU, au moment où la Loi-cadre de l’Enseignement national en vigueur (N°86/005 du 22 septembre 1986) consacre le monopole de l’Etat dans ce domaine, les autorités congolaises ont, en 1989, fini par adopter une règlementation portant autorisation de création et de fonctionnement des établissements privés d’ESU à laquelle devaient être soumis tous les établissements privés en cours de fonctionnement.

Selon cet auteur, l’une des preuves de la pertinence de l’ESU privé est la qualité de la formation dispensée et la satisfaction dans l’utilisation des diplômés par les employeurs.  Toutefois, il reconnaît les dérives de ces établissements privés en RDC, ce qui pose le problème de leur rationalisation.

Les dispositions de la nouvelle loi-cadre n°14/004 de l’enseignement national du 11 février 2014 ont apporté des changements substantiels dans certaines matières, notamment la fin dudit monopole de l’Etat, tout en maintenant les aspects essentiels de ce sous-secteur, notamment les missions, la structure, les objectifs.

Cet article s’intéresse au développement de l’ESU privé pendant la période qui a précédé la promulgation de la nouvelle Loi-cadre de l’enseignement national. Ce contexte est à situer dans le temps, c’est-à-dire aux environs des années 1990, pour expliquer les facteurs qui ont contribué à l’émergence et au développement de l’enseignement supérieur et universitaire privé en violation des dispositions législatives en vigueur. Aussi, l’article analyse l’incidence du développement du secteur privé dans ce contexte sur la gestion de la qualité de l’enseignement.

 

Il s’article s’articule autour des principaux points suivants : (i) Bref aperçu historique de l’ESU en RDC, (ii) Facteurs explicatifs du développement de l’ESU privé, (iii) Développement institutionnel de l’ESU privé (v) Incidence du contexte du développement du secteur privé sur la qualité de l’enseignement.

 

1.       Bref aperçu historique de l’ESU en RDC

L’organisation des enseignements universitaires en République Démocratique du Congo est à situer vers les années 1944. En effet, c’était d’octobre 1944 à juillet 1946, pour faire face au besoin des enfants de colons qui ne pouvaient pas partir continuer leurs études universitaires dans la métropole, que furent organisés des cours universitaires.  En 1947, fut organisé à Kisantu, Province du Kongo Central, un enseignement universitaire pour africains, dans un « Centre universitaire » qui prit en 1949, le nom de « Lovanium » (de Saint Moulin, L. 2007, p. 29).

C’est dans cette foulée de la fin de la décolonisation que fût créé l’Université Lovanium en 1954 (actuellement Université de Kinshasa), mais qui ne recevra officiellement le titre d’université qu’en 1956. Il s’agit là d’une université d’obédience catholique avec un Conseil d’Administration à l’Université de Louvain en Belgique. Viendra ensuite l’Université Officielle du Congo belge et du Rwanda et Urundi (aujourd'hui Université de Lubumbashi), créé en 1956 par les laïcs belges, en réaction à la création de l’Université Lovanium. Ce fut une institution étatique, contrôlée totalement par l’État.

En 1963, fut créée l’Université Libre du Congo (présentement Université de Kisangani) d’obédience protestante. 

Dans l’ensemble, en 1970, le nombre des étudiants s’élevait à 3.285 à Lovanium, 2.291 à l’Université Officielle du Congo et 577 à l’Université Libre du Congo, soit un total de 6.153 étudiants pour les 3 universités.

Au fil du temps, l’histoire de l’ESU en RDC a été caractérisée par plusieurs réformes (Mpevo Mpolo, 2012 ; Tshibangu Tshishiku, 2006 ; Maketa, 2011) qui ont totalement bouleversé le paysage universitaire en RDC dont les principales sont :

-       1971 : L’étatisation de tous les établissements d’enseignement supérieur et universitaire en les unifiant en une seule institution dénommée Université Nationale du Zaïre, UNAZA en sigle, qui sont tous passés sous le contrôle de l’État avec un seul Conseil d’administration ;

-       1981 : Face aux déficiences de la Réforme de 1971, l’Etat avait procédé à la décentralisation du fonctionnement des établissements de l’ESU, en éclatant l’UNAZA au niveau de l’autorité centrale en entités comprenant trois Conseils d’Administration respectivement pour les Instituts Supérieurs Pédagogiques (ISP), les Instituts Supérieurs Techniques (IST) et les universités ;

-       1989 : La fin du monopole de l’Etat dans le secteur de l’ESU. Les deux réformes précédentes n’ayant pas atteint les objectifs escomptés, ce fut une opportunité pour l’initiative privé dans le secteur de l’ESU. On a assisté à la création des établissements privés sur toute l’étendue du territoire national ;

-       1993 : La politique d’essaimage de 1992 a consisté en l’ouverture, par le Ministre de l’ESU, d’environs 256 nouveaux établissements constitués d’universités et d’instituts supérieurs sans avoir réuni au préalable toutes les conditions nécessaires à cette opération. Le but poursuivi était de résoudre le problème de déséquilibre géographique au niveau national dans ce domaine. Deux ans après, c’est-à-dire en 1996, le Gouvernement a dû faire marche arrière. Sur les 256 établissements créés, 69 furent agréés comme des établissements privés. Les 187 autres n’ont pas été reconnus et sont restés sans un statut juridique clair alors que certains étaient déjà opérationnels avec le statut d'établissements publics.  Dans ces conditions, certains furent obligés de fonctionner comme des établissements privés gonflant ainsi le nombre des établissements privés non reconnus par l'Etat.

-       2003 : Le Pacte de modernisation de l’enseignement supérieur et universitaire (PADEM) est réforme née de la nécessité de se mettre au pas avec les pairs africains sur l’organisation de l’enseignement supérieur, de tenir compte de la mondialisation, de revendications des acteurs principaux de l'éducation (étudiants, enseignants, administratifs) notamment sur l'amélioration des programmes d'enseignement.

Toutes ces réformes ont eu des incidences sur l’organisation et la gestion de l’ESU en RDC en général, et particulièrement sur certains aspects du sous-système, notamment sur le nombre d’établissements d’ESU, les effectifs des étudiants et du personnel enseignant, les programmes d’enseignement. Parmi ces conséquences, nous notons le développement de l’enseignement supérieur et universitaire privé qui fait l’objet du présent article.

2.      Facteurs explicatifs du développement de l’ESU privé                             

Ce développement de l’ESU privé s’est réalisé dans un contexte caractérisé par plusieurs facteurs dont notamment (i) une forte demande sociale, (ii) la faible capacité d’accueil des établissements du secteur public, (iii) le faible rendement interne du système public et (iv) les facteurs d’ordre politique.                                                                                                                                     

a.              Forte demande sociale d’éducation du supérieur

Le secteur privé d'ESU en RD Congo a constitué une réponse à une demande sociale d’éducation que le secteur public ne pouvait pas satisfaire. Cette demande sociale d’éducation, qui est la conséquence logique de l’évolution démographique, s’est traduite par les faits ci-après : l’évolution des diplômés du secondaire qui s’est répercutée sur les effectifs des étudiants au niveau de l’enseignement supérieur et universitaire, soutenue par l’assouplissement de la règlementation en rapport avec les conditions d’admission.

(i)                Evolution des diplômés du secondaire et l'accès à l'ESU

L'accès à l'enseignement supérieur et universitaire en RD Congo, comme dit plus haut, est conditionné par l'obtention du diplôme d'Etat sanctionnant la fin des études secondaires. A travers le temps, le nombre des diplômés du secondaire a fortement augmenté, ce qui a fini par poser le problème d'accès à l'ESU vu la capacité d'accueil réduite des établissements existants.

KUPELESA (2007), l’affirme bien en disant que depuis plus de deux décennies, les portes des instituts supérieurs et des universités se sont largement ouvertes à cause de l’explosion du taux de scolarisation au primaire et au secondaire et du nombre des diplômés des sections donnant accès à l’enseignement supérieur et universitaire. Cette situation est traduite dans le tableau ci-après.

 

Tableau 1 : Evolution des diplômés du secondaire et accès à l’ESU

 

Années                  

 

Diplômés d’Etat

           Entrants en 1er  Graduat

 

Taux brut d’accès (%)

Effectifs

Taux d’accroissement (%)

(1)

(2)

(3)

(4)

(5)=(3)/(2)

1974/75

12.363

-

-

-

1975/76

18.581

9.200

-

50

1976/77

17.064

10.396

13,0

61

1977/78

-

11.019

6,0

-

1978/79

17.733          

11.680

6,0

66

1979/80

 20701

9.695

-16,9

47

1980/81

         24102

11.945

23,2

50

1981/82

20.530

10.070

-15,7

49

1982/83

26.026

14.715

46,1

57

1983/84

34.650

12.395

-15,8

36

1984/85

38.157

14.689

18,5

38

1985/86

42.264

17.760

20,9

42

1986/87

40.913

21.069

18,6

51

1987/88

52.715

23.040

9,3

44

1988/89

49.840

28.819

25,1

58

1989/90

53.360

30.900

7,2

58

Total

468.999

237.392

 

51

Sources : Inspection Générale de l’Enseignement, Revue de l’Inspecteur d’enseignement, 2003

Il ressort de ce tableau que durant la période allant de 1975 à 1990, l’ESU n’a pu accueillir en moyenne que 51 % des diplômés du secondaire les années qui ont suivi immédiatement l’obtention de leurs diplômes. Parmi les 49% des diplômés restants, certains n’ont pas pu obtenir une place dans le secteur public pour de raisons diverses, dont notamment la faible capacité d’accueil, et auraient opté pour le secteur privé.

(ii)         Evolution des effectifs des étudiants de l’ESU

Le tableau ci-dessous retrace l’évolution des effectifs des étudiants depuis l’origine de l’université en RDC jusqu’en 1990.

 

Tableau 2 : Evolution des effectifs des étudiants de l’ESU selon les années

 

Années

Effectifs

Taux d’accroissement annuel moyen (%)

1954  - 1955

33

 

1959 - 1960

763

455,2

1964 - 1965

2.966

55,7

1969 - 1970

10.212

40,9

1974 - 1975

22.057

28,8

1979 - 1980

26.508

4,0

1989 - 1990

66.617

14,5

Taux moyen d’accroissement annuel

 

 

99,85

Source: Rapport final: Activité C.2 PRESU Kinshasa, Zaïre, 1991.

Le taux moyen d’accroissement annuel des étudiants est de 99,85% qui peut être arrondi à 100%. Ce qui traduit un dynamisme avéré de la demande sociale au niveau de l’ESU.

 

Le taux d'accroissement annuel moyen de 455,2 % en 1959-1960 s'explique notamment par le fait qu'à l'accession de la RD Congo à l'indépendance, une priorité fut accordée à la formation de cadres de haut niveau devant prendre la relève du pays après le départ des colons belges. D'où l'engouement des jeunes pour ce niveau de formation, seule voie d'accès à un statut élevé dans l’échelle sociale.

(iii)           Evolution de la réglementation concernant l'admission des étudiants     

Comme dit plus haut, l'ESU en RD Congo est conçu actuellement comme un enseignement de masse. Ceci se traduit par l'évolution des conditions d'admission présentée ci-dessous qui constitue un facteur incitateur important pour la forte demande à l'entrée de ce niveau de formation.

 

Tableau 3. Evolution des critères d’admission à l’ESU         selon les années

 

Années

      Critères/Conditions d’admission

Avant 1966

Le diplôme homologué donne accès à la 1ère année.

Le diplôme non homologué de six années d'études secondaires donne accès à l'année préparatoire.

1966

Instauration d'une épreuve de sélection, appelée épreuve de maturité, destinée au départ à l'obtention d'une bourse d'études, par la suite pour être inscrit

1967

Institution du diplôme d'Etat + réussite à l'épreuve de maturité donnaient accès en 1ère année avec bourse

1968

Institution du diplôme d'Etat + réussite à l'épreuve de maturité donnaient accès en 1ère année avec bourse

1969

Réinstauration de l'épreuve de maturité, autres conditions  inchangées.

1970

Diplôme d’Etat.

Suppression du certificat d'Etat

1972

Diplôme d'Etat obtenu avec 60% + réussite à l'épreuve de maturité donne accès à la 1ère année, tout autre diplôme donne accès à l'année préparatoire

1975

Diplôme d’Etat.

Suppression de l’épreuve de maturité.

1977

Diplôme d'Etat obtenu avec au moins 60 % donne accès à l'université; un minimum de 55% donne accès aux  Instituts Supérieurs,  moins de 55% donne accès à l'année préparatoire.

1978

Diplôme d'Etat avec au moins 60% donne accès à l’université et aux Instituts Supérieurs.

1979

Retour aux conditions de 1977 mais avec suppression l'année préparatoire.

1982

Diplôme d’Etat, seule condition pour avoir accès et à l'Université et aux Instituts Supérieurs : diplôme d'Etat, quel que soit le pourcentage.

A ce jour (à partir de 2013)

Diplôme d’Etat ou titre équivalent obtenu avec 60% au moins : admission en 1ère année de graduat de l’ESU ;

-          diplôme d’Etat ou titre équivalent obtenu avec entre 50 et 59%: admission en 1ère année de graduat de l’ESU sur concours;

-          admission en 1ère année  préparatoire aux institutions qui organisent les filières techniques s’obtient sur titre.

 

 

-           

 

b.      Modicité de la capacité d'accueil du secteur public

La capacité d’accueil a été un des problèmes majeurs dans l’offre de l’éducation au niveau de l’ESU au moment où la demande sociale prenait de l’ampleur. Cette situation est illustrée dans le tableau ci-dessous :

Tableau 4. Répartition de la capacité d'accueil et sursaturation par secteur de l’ESU

 

Secteur

Capacité d’accueil totale (1980/1981)

Effectifs des étudiants admis    (1988-1989)

Sursaturation

Taux de sursaturation

Université et Institut Facultaire

 

9.927

 

27.166

 

17.239

 

173

IST

10 .045

19.931

9.886

98

ISP

8.521

14.325

5.804

68

Total

28.493

61.422

32.929

115

Source : Rapport final, Activité C.2 (PRESU) Kinshasa, Zaïre, 1991.

Ce tableau montre bien que la capacité d’accueil totale des établissements de l'ESU en 1980-1981 était de 28.493 places. Et c'est avec cette capacité que le système a fonctionné en 1988-1989 avec une surpopulation de 32.929 étudiants, soit un taux de sursaturation de 115 %.

 

c.              Faible rendement interne du système

Le faible rendement interne de l'ESU serait aussi un facteur non négligeable à la base de l'expansion du secteur privé. En effet, les rejetés du secteur public, non satisfaits du sort leur réservés, ont toujours cherché à poursuivre leurs études supérieures. Et le secteur privé s’est présenté à eux comme une solution alternative à leur problème.

Le taux de déperdition dans le secteur public a été évalué comme suit durant l’année académique 1987/1988:

Tableau 5. Taux de déperdition des étudiants par année d’études selon les secteurs

 

Secteur

Tx de déperdition

Total

G1

G2

G3

L1

L2

 

UNIVERSITE

80,2

46,2

22,4

48,3

17,8

59,4

IST

52,5

31,7

18,7

10,3

46,4

39,6

ISP

69,3

43,0

32,9

56,2

52,7

55,5

Sources : Rapport final: Activité C.2 (PRESU), Kinshasa, Zaïre, 1991.

Ce tableau présente les taux de déperdition dans le secteur public de l’ESU selon les années d’études pour l’année académique 1987/88, c’est-à-dire aux environs des années 90 qui ont connu le début de la montée en puissance des initiatives privées dans le secteur. Il indique que le taux de déperdition est très élevé dans les premières années (années de recrutement). Il est de 80,2 %, 52,5 % et de 69,3 % respectivement pour les Universités, les Instituts Supérieurs Techniques et les Instituts Supérieurs Pédagogiques.

Ce même faible rendement interne de l’ESU, pris globalement quelques années après 1990, a été également souligné lors des Etats Généraux de l’Education au Zaïre, tenue en janvier 1996. Le rapport de ces assises a présenté les indicateurs suivants : Taux de déperdition 80%, Taux d’efficience 20% et Taux d’efficacité 33%, qui s’expliqueraient par l’insuffisance qualitative et quantitative de l’encadrement pédagogique des apprenants par les enseignants et par les services appropriés des établissements d’enseignement.

Cela suppose que les candidats potentiels pour les études supérieures dans le secteur privé proviendraient de nouveaux diplômés du secondaire n'ayant pas obtenu leur inscription dans le secteur public et des rejetés de ce secteur.

d.      Facteurs d'ordre politique

La période de transition politique vers la 3è République a eu de répercussions sérieuses sur l’ESU.  A part le désengagement de l'Etat dans ce domaine, caractérisé notamment par l'insuffisance du financement, les établissements d’ESU étaient devenus de foyer des tensions politiques et des contestations du régime en place. Ceci s’était traduit notamment par la grève des professeurs, les manifestations des étudiants. Ce qui amena l'autorité politique à procéder à des fermetures intempestives de ceux-ci, allant jusqu'à connaître des années blanches chaque fois que ladite autorité se sentait menacée. Cette situation a créé une certaine méfiance vis-à-vis du secteur public, rendant ainsi le secteur privé plus sécurisant pour les études supérieures régulières en RD Congo.

Un autre facteur non moins important fut le clientélisme et le favoritisme liés à l’occupation des postes politiques par certaines personnalités s’imaginant que leur crédit auprès de leurs milieux d’origine respectifs dépendait entre autres de la création d’une institution d’enseignement supérieur comme signe d’élévation et de réussite. Ainsi, s’est incrustée comme marque de prestige, le mirage d’avoir une « université » ou un « institut supérieur », sans tenir compte des exigences de son existence, dans toute contrée qui pouvait s’en procurer grâce à un bienfaiteur « politicien fondateur » de ladite institution et qui pouvait arracher un arrêté ministériel auprès du Ministère de l’ESU (MINESU).

 

e.      Faible financement du secteur

L’un des facteurs majeurs qui a influé négativement l’organisation et le fonctionnement du secteur de l’éducation en général et de l’enseignement supérieur et universitaire en particulier a été le faible financement du secteur caractérisé par l’inadéquation entre le financement et les objectifs de l’enseignement, de la recherche et des services de qualité à la communauté.

Selon le rapport établi par le MINESU (2009), au début des années 60, près de 30% du budget de l’Etat était consacré au secteur de l’éducation avec une proportion d’environ 25%, en moyenne, pour l’enseignement supérieur et universitaire.

Cette part du budget national réservée à l’ESU a connu une régression sensible à partir des années 1990. De 16% en 1980, elle est passée, en 2008, à 2,24% pour les crédits accordés et à 1,44% pour les crédits exécutés

Cette situation a handicapé sérieusement le bon fonctionnement du système en général, et en particulier, la mise en œuvre de la stratégie de régularisation de la situation des établissements privés pour pouvoir prétendre à un enseignement de qualité.

 

3.       Développement institutionnel de l’ESU privé

Ce développement institutionnel prend en compte l’élaboration d’une règlementation dans le sens de régulariser la situation existante sur terrain et l’aspect   quantitatif des établissements privés d'ESU.

a.              Elaboration d'une réglementation a posteriori.

Se trouvant devant un fait accompli avec l’existence d’établissements privés d’ESU sans base légale, les pouvoirs publics se sont vu obliger de mettre sur pied à posteriori une réglementation à laquelle devaient être soumis tous les établissements privés.         

Dans cet élan de régularisation, ce fut d’abord la Décision d’Etat du Comité Central du Parti au pouvoir N° CC/75 du 29 avril 1989 libéralisant la création des établissements d’ESU, suivie ensuite des Arrêtés ministériels n° 0246/92 du 14/8/1992 et n° 0376/93 du 17/9/1993 portant respectivement (i) fixation des conditions d'agrément d'un établissement privé d'enseignement supérieur et d'enseignement universitaire et (ii) création de la commission de contrôle des établissements privés d’enseignement supérieur et universitaire. En fin de compte, toutes ces dispositions ont été intégrées dans la nouvelle Loi-cadre de l’enseignement national n° 14/004 du 14 février 2014.

Il y a lieu de noter que ces dispositions règlementaires ont connu beaucoup d’insuffisance dans leur mise en œuvre en ce sens que sur terrain, on a assisté à l’existence de nombreux établissements ne répondant pas aux conditions exigées ou tout simplement fonctionnant dans l’illégalité. Ce qui amena le Ministère de l’ESU à initier, entre 2010 et 2011, une enquête de viabilité des établissements sur l’ensemble du pays.

A l’issue de celle-ci, il a été noté que sur les 808 établissements identifiés, 284 établissements (soit 35%), dont 219 privés (soit 77%), furent déclarés non viables, 352 établissements (soit 43%), dont 129 privés (soit 36%), classés dans la catégorie « intermédiaire » et 172 établissements (soit 21%), dont 91 privés (soit 53%), déclarés viables. Comme l’évaluation a porté sur les conditions minima de viabilité, on peut ranger dans la même catégorie les établissements déclarés « non viables » et « intermédiaires », qui font un total de 636 (soit 79%), comme ne remplissant pas les conditions minima de fonctionnement parce ayant obtenu une note moyenne inférieure à 50%.

Les établissements déclarés non viables furent fermés. Cependant, les établissements classés dans la catégorie « intermédiaire » ont bénéficié d’un sursis pour pouvoir remédier à la situation au risque d’être déclarés non viables et par conséquent fermés.

b.      Développement quantitatif des établissements privés

En ce qui concerne particulièrement l’aspect quantitatif, les seules données disponibles sont celles en rapport avec le nombre d'établissements existants. Celles relatives aux effectifs des étudiants sont difficiles à obtenir dans la mesure où les établissements privés ne faisaient pas rapports de fonctionnement de façon régulière à la tutelle une fois qu'ils étaient autorisés à fonctionner.

 

(i)                Avant 1992

Le rapport de la Direction de la Planification de l'ESU fait état de 182 établissements privés d'ESU, dont 86 agréés et 96 autorisés à fonctionner.

En dehors de ces établissements identifiés, il en existait d'autres qui fonctionnaient sans avoir l'autorisation de fonctionner, échappant ainsi à tout contrôle de l'Etat.  

Pour la période sous revue, la situation des établissements publics et privés de l'ESU en RDC se présente de la manière suivante :

 

Tableau 6. Cartographie des établissements publics et privés d’ESU en 1992

 

Statut

Univ.

I. Fac

IST

ISP

Total

Anciens Ets. publics

3

1

19

14

37

Ets. Issus des extensions

-

-

24

5

29

Ets. Issus de l’essaimage

9

-

45

15

69

Ets. Privés agrées

16

20

47

3

86

Ets. Autorisés à fonctionner

20

10

63

3

96

Total

48

31

198

40

317

Sources : Rapport final, Activité C.2 (PRESU) op.cit.

Au total, 317 établissements ont été identifiés parmi lesquels 79 établissements d’enseignement universitaire dont 48 universités et 31 Instituts facultaires, 198 instituts supérieurs techniques et 40 instituts supérieurs pédagogiques.

Sur les 79 établissements d’enseignement universitaire, 4 sont des établissements publics (3 universités et 1 institut facultaire), 75 sont des établissements privés (45 universités et 30 instituts facultaires).

La situation des instituts supérieurs se présente comme suit : sur les 198 IST, 43 sont publics et 155 sont privés. Sur les 40 ISP, 19 sont publics et 21 sont privés.

 

(ii)              Carte globale des établissements d'ESU en RDC

Le présent paragraphe présente la situation actuelle de l’enseignement supérieur et universitaire en RDC en ce qui concerne le nombre d’établissements, le nombre d’étudiants, le nombre d’enseignants, le financement du secteur par le pouvoir public pour la période allant de 2006 à 2015.

A ce jour, le nombre d’établissements publics et privés agréés d’enseignement supérieur et universitaire en RD Congo se présente comme suit :

 

 

 

Tableau 7. Evolution des Etablissements d’ESU par année académique de 2006/07 à       2014/15

 

                       Année

Secteurs

2006-07

2007-08

2008-09

2009-010

2010-011

Universités publiques

31

47

72

53

65

ISP publics

58

59

79

88

138

IST publics

106

109

150

162

247

Total public

195

215

301

303

450

Universités privées

63

74

110

119

168

ISP privés

6

8

5

7

10

IST privés

128

111

143

132

195

Total privé

197

193

258

258

373

Universités publiques + privées

94

121

182

172

233

ISP publics  + privés

64

67

84

95

148

IST publics + privés

234

220

293

294

442

Total publics + privés

392

408

559

561

823

Evolution en %

-

4

37

0

47

 

 

Année

Secteurs

2011-012

2012-013

2013-014

2014-015

Universités publiques

43

46

47

48

ISP publics

120

110

134

137

IST publics

218

194

218

223

Total public

381

350

399

408

Universités privées

156

137

171

192

ISP privés

14

8

17

26

IST privés

201

196

240

276

Total privé

371

341

428

494

Universités publiques + privées

199

183

218

240

ISP publics  + privés

134

118

151

163

IST publics + privés

419

390

458

499

Total publics + privés

752

691

827

902

Evolution en %

-4

-19

20

9

Source : Direction de la Planification de l'ESU, 2016

                                                                      

De 2006/2007 à 2014/2015, le nombre d’établissements publics et privés d’ESU est passé de 392 à 902, avec des variations positives et négatives entre ces deux extrêmes. Mais de façon générale, l’évolution est positive.  Le nombre d’établissements publics est passé de 195 à 408 tandis que celui des établissements privés est passé de 197 à 494. Le secteur public compte 48 universités et tandis que le secteur privé en compte 192.

 

Au vu de ces statistiques, le constat est que le secteur privé de l’enseignement supérieur et universitaire s’est développé beaucoup plus vite que celui du secteur public.  

Comme on peut le remarquer, il s’agit d’une évolution non linéaire qui traduit le caractère aléatoire de la création de ces établissements, sans une planification rationnelle qui devrait en principe répondre aux besoins réels, qu’il s’agisse de besoins économiques du marché de l’emploi ou de la demande sociale d’éducation du supérieur.

                                                                                              

Tableau 8. Evolution du nombre d’étudiants dans le secteur public de 2006 à 2011

 

                Année

Secteurs

2006-07

2007-08

2008-09

2009-010

2010-011

Universités pub.

74 923

113 088

119 897

109 641

163 098

ISP pub.

20 655

29 225

38 232

39 550

60 536

IST pub.

83 120

98 393

135 927

105 758

139 097

Total pub.

178 698

240 706

294 056

254 949

362 731

 

Tableau 9. Evolution du nombre d’étudiants dans le secteur privé de 2006 à 2011

 

                Année

Secteurs

2006-07

2007-08

2008-09

2009-010

2010-011

Universités priv.

26 751

40 869

48 549

49 785

75 110

ISP privés

197

836

475

560

867

IST privés

31 933

26 328

36 787

33 095

48 977

Total privé

58 881

68 033

85 811

83 440

124 954

 


 

Tableau 10. Evolution du nombre d’étudiants dans les secteurs public et privé de 2006 à 2011

 

                Année

Secteurs

2006-07

2007-08

2008-09

2009-010

2010-011

Universités pub. Et privées

101 674

153 957

168 446

159 426

238 208

ISP public et privé

20 852

30 061

38 707

40 110

61 403

IST public et privés

115 053

124 721

172 714

138 853

188 074

Total privé

237 579

308 739

379 867

338 389

487 685

                                                                                              

Tableau 11. Evolution du nombre d’étudiants dans le secteur public de 2011 à 2015

 

                Année

Secteurs

2011-12

2012-13

2013-14

2014-15

Universités pub.

183 803

139 737

133225

133 270

ISP pub.

53 552

47 660

49565

52 383

IST pub.

138 650

126 866

127877

135 379

Total pub.

376 005

314 263

310 667

321 032

 

Tableau 12. Evolution du nombre d’étudiants dans le secteur privé de 2011 à 2015

 

                Année

Secteurs

2011-12

2012-13

2013-14

2014-15

Universités priv.

183 803

139 737

133225

133 270

ISP privés

53 552

47 660

49565

52 383

IST privés

138 650

126 866

127877

135 379

Total privé

376 005

314 263

310 667

321 032

 

 


 

Tableau 13. Evolution du nombre d’étudiants dans les secteurs public et privé de 2011 à 2015

 

                Année

Secteurs

2011-12

2012-13

2013-14

2014-15

Universités pub. Et  privées.

260 670

213 022

210 087

215 076

ISP pub. et privés

54 976

48 959

51 313

54 872

IST pub. et privés

196 676

175 547

185 167

203 945

Total pub. et privé

512 322

437 528

446 567

473 893

Source : Direction de la Planification de l'ESU, 2016

 

Les données statistiques de l’année académique 2014/2015 indique un total de 473.893 étudiants dont 321.032 (soit 67,74 %) pour le secteur public et 152.861 (soit 32,26 %) pour le secteur privé.

Pour ce qui concerne les universités, sur un total de 215.076 étudiants, le secteur public totalise 133.270 (soit 62 %) tandis que le secteur privé en compte 81.806 (soit 38 %).

Le constat qui se dégage de ces données est que malgré l’avantage quantitatif des établissements privés d’ESU et plus particulièrement des universités privées, le secteur public regorge le plus grand nombre d’étudiants. Généralement, les établissements privés d’ESU sont de petite taille et sont localisés en grande partie dans les centres urbains.

 

4.       Incidence du contexte du développement du secteur privé sur la qualité de l’enseignement

Le développement de l’enseignement supérieur et universitaire privé dans le contexte décrit ci-haut d’une part et, d’autre part, le mécanisme mis en place par le ministère de l’ESU pour gérer cette question dans le sens de la régularisation, ont montré leur limite. Quelques facteurs ont caractérisé ou caractérisent encore le fonctionnement de ces établissements et dont l'impact sur la qualité n'est pas à négliger. Ceci se traduit notamment par les aspects ci-après :

 

 

 

a.             Manque d'un mécanisme permanent de suivi et de contrôle de la qualité

Le secteur privé s’est développé dans un contexte caractérisé par le manque d’une règlementation élaboré a priori. Au moment où les établissements existants étaient déjà opérationnels jusqu’à produire les diplômés sur le marché du travail, il devenait ainsi difficile pour les pouvoirs publics de bien maîtriser la situation, notamment en ce qui concerne la gestion de la qualité.

Implicitement, les établissements privés devraient se conformer aux textes règlementaires élaborés à cet effet. Malheureusement, cela n’a pas été le cas dans l’ensemble, parce qu’une fois agréés ou reconnus officiellement, la gestion de la qualité de l’enseignement dispensé n’est pas assurée par un mécanisme permanent.

Bien que les arrêtés précités prévoient une procédure devant conduire à l'agrément de l'établissement, et par conséquent à la reconnaissance du diplôme délivré, il se fait malheureusement qu'en pratique, suite à certaines contraintes, notamment le manque de moyens financiers pour faire fonctionner la « Commission d’agrément des établissements privés d’ESU » , ce contrôle de viabilité, soit intervenait  tardivement alors que l'établissement a déjà fonctionné pendant des années et même produit de diplômés, soit n'intervenait pas du tout et l'établissement a continué à fonctionner comme tel.         Le recours éventuel à d’autres mécanismes de régularisation de la situation existante, notamment la reconnaissance des diplômes délivrés, était envisagée pour permettre à leurs détenteurs de trouver de l’emploi sur le marché.

Aussi, le caractère ponctuel des missions réalisées sur terrain par ladite commission, en fonction de besoins exprimés par les établissements qui sollicitent leur reconnaissance officielle (accréditation, habilitation), n'est pas de nature à assurer la cohérence de ce processus dans son ensemble.

La composition même de la commission ainsi que les procédures utilisées pour ce faire ne garantissent pas la validité des résultats obtenus. Cette commission comprend les experts provenant de l’Administration du Ministère d’ESU, des Services spécialisés du Ministère et du Cabinet politique du Ministre ayant l’ESU dans ses attributions.

Pour preuve par rapport à tout ce qui précède, l’enquête de viabilité, initiée par le Ministère de l’ESU entre 2010 et 2011, a abouti à la fermeture d’au moins 349 établissements déclarés non viables (c’est-à-dire ne répondant pas aux critères minima de fonctionnement) sur les 808 identifiés, dont 65 publics et 284 privés. Concernant les universités, sur un total de 233 établissements identifiés, 6 sur 45 universités et 100 sur 188 universités ont été déclarées non viables et fermés respectivement pour le secteur public et privé.

b.            Par rapport à leur fonctionnement, les cas de figure ci-après peuvent être relevés :

-          l'utilisation d'une infrastructure inappropriée pour ce type d'institutions. En général, à leur création, la plupart de ces établissements privés n’avaient pas d’infrastructures propres. Ils ont fonctionné dans les bâtiments en location, qui ont été conçus pour d'autres fins. D’autres, jusqu’à ce jour se retrouvent encore dans cette situation.

-          le manque d’un personnel enseignant permanent qualifié, d’où le recours quasi total au personnel enseignant à temps partiel (professeurs visiteurs), c'est-à-dire au personnel enseignant du secteur public et autre du secteur productif. Ceci traduit le manque d’une politique de relève académique étant donné que ces établissements, dans le but de minimiser le coût, recrutent difficilement les assistants. En effet, le personnel à temps partiel vient juste pour s'acquitter de la charge horaire conformément au calendrier établi et suivant les clauses du contrat de peur d'entraîner d'autres frais. Ce qui préjudicie lourdement les étudiants en ce qui concerne leur encadrement sur plusieurs aspects de la vie académique (travaux pratiques, recherches) ;

-          le manque d'un équipement pédagogique, scientifique et technique (bibliothèque, laboratoires, ateliers) approprié.

-          le manque d'une politique de recherche, dû notamment à l'absence d'un personnel académique et de recherche permanent, se traduisant notamment par l’absence de publications scientifiques, de manifestations scientifiques (conférences, …).

-          la nomination des autorités académiques ne remplissant pas les conditions exigées pour ce faire.    

Conclusion

Le secteur privé de l’enseignement supérieur et universitaire en République Démocratique du Congo (RDC) a connu un développement remarquable à partir des années 1990 sur une base non légale.

Les facteurs explicatifs de cette situation trouvent leur fondement dans le déficit organisationnel et fonctionnel du secteur public, notamment la faiblesse de l’offre de l’éducation face à la pression de la demande sociale en pleine évolution, le faible rendement interne du système dont les rejetés ont trouvé leur refuge dans le secteur privé, l’intrusion du politique dans la création des établissements privés.

Devant cette réalité, l’adoption d’une réglementation a posteriori par les pouvoirs publics n’a pas pu juguler le mal.  En revanche, malgré l’existence de cette réglementation, les établissements privés ont continué à fonctionner dans des conditions non maîtrisées par le pouvoir organisateur par manque d’un mécanisme permanent de suivi et d’évaluation de la qualité de l’enseignement.

La conséquence logique qui découle  de cet état de choses est la faible qualité de l’enseignement au sein de ces institutions privées prises globalement, due essentiellement à l'utilisation d'une infrastructure inappropriée, au manque d’un personnel enseignant permanent qualifié, d’où le recours quasi total au personnel enseignant à temps partiel (professeurs visiteurs), au manque d'un équipement pédagogique, scientifique et technique (bibliothèque, laboratoires, ateliers) approprié, en l’absence d'une politique de recherche, au problème de gouvernance en ce qui concerne notamment le mode de désignation des autorités académiques qui, dans beaucoup de cas, ne sont pas qualifiées pour ce faire,  portant ainsi préjudice au bon fonctionnement de ces  établissements.

Il faudra toutefois reconnaître l’existence de certains établissements privés qui présenteraient certains indicateurs de qualité relativement plus pertinents que ceux rencontrés dans les universités publiques.

Il revient alors au Ministère de l’ESU de rendre opérationnelles les nouvelles dispositions prises dans le cadre du processus de réforme en cours, notamment la mise en œuvre de la politique d’assurance qualité au sein des établissements, pour jeter les bases solides d’un enseignement supérieur et universitaire de qualité et compétitif dans le contexte de la mondialisation.

           

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